Hadopi : coup dur pour l’autorité, l’identification des pirates est jugée contraire à la constitution
Le Conseil Constitutionnel vient de rendre une décision historique qui porte un coup dur à la Hadopi et à sa riposte graduée. L’identification des pirates est jugée anticonstitutionnelle. L’autorité n’a pas le droit d’exiger des FAI la levée de l’anonymat des personnes soupçonnées de piratage sans passer par un juge.
Depuis 2009, la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet ou Hadopi s’est vu confier une mission d’envergure par le gouvernement. Celle de lutter contre l’accès illégal aux œuvres protégées par des droits d’auteur. Jusqu’à présent, lorsque l’autorité repère les adresses IP des pirates, elle peut exiger aux FAI de lui fournir des informations permettant d’identifier ces derniers et ainsi de mettre en oeuvre son plan de riposte graduée.
Dans une décision que vient de rendre le Conseil Constitutionnel, cette prérogative de la Hadopi est jugée anti-constitutionnelle. En d’autres termes, l’autorité n’a plus le droit de lever l’anonymat des internautes sans passer par l’aval d’un juge. Le gouvernement a jusqu’au 31 décembre 2020 pour se mettre en conformité avec la constitution.
Ce jugement est l’aboutissement d’un recours déposé auprès du Conseil Constitutionnel par plusieurs associations de défense de la vie privée et de la liberté des internautes, notamment la French Data Network, la Fédération FDN (fournisseurs d’accès à internet associatifs), ou encore de La Quadrature du Net. Pour cette dernière, il s’agit d’une victoire majeure.
« Nous venons de gagner contre la HADOPI devant le Conseil Constitutionnel. L’essentiel de ses pouvoirs sont déclarés contraires à la Constitution et prendront fin d’ici la fin de l’année ». a écrit l’association dans un tweet publié le 20 mai.
Elle déclare par ailleurs ceci dans un communiqué : « Si nous avons été nombreux à nous moquer, avant son adoption, de l’inutilité de la Hadopi, il ne faut pas minimiser la nocivité qu’aura eu son action en 10 années. Elle aura vivement dissuadé la population de recourir à la pratique vertueuse, libre et décentralisée qu’est le partage d’œuvres de pair à pair ».
La Hadopi n’a plus lieu d’être
La Quadrature Du Net soutient que la Hadopi est devenue une institution caduque et doit disparaître. L’association enfonce là une porte ouverte puisque la loi sur la réforme de l’audiovisuel a déjà prévu la suppression de l’autorité qui sera remplacée par l’Arcom qui est une fusion de la Hadopi et du CSA avec de nouvelles prérogatives pour la lutte contre le piratage.
Alors que la Hadopi n’a aucun pouvoir légal pour lutter contre les nouvelles pratiques telles que l’IPTV et le streaming, la loi sur la réforme de l’audiovisuel accorde des prérogatives beaucoup plus vastes à l’Arcom pour mener la lutte. La nouvelle institution devra toutefois elle aussi se conformer à la décision de la cour constitutionnelle quant à la levée de l’anonymat des pirates, ce qui devrait ralentir le processus de la riposte graduée dont l’efficacité était déjà largement débattue.